(ella), dancing with myself.

1 Estella, c'était peut-être la petite princesse des Mayer. Elle n'était pas capricieuse pourtant, ni pourrie gâtée. Et certainement pas fragile. Mais on l'a toujours protégée, malgré tout. Ses frères, surtout. Estella, c'est l'enfant du milieu - et pourtant, son frère aîné comme son frère cadet, la protègent. Souvent, elle râle, Ella. Mais finalement, ça ne la dérange pas tant que ça - bien souvent, ils ne sont pas si chiants. Ils sont simplement très proches, tous les trois, depuis toujours. 2 Elle a toujours été travailleuse, Estella. Jamais du genre à se reposer sur ses lauriers, jamais du genre à dépendre des autres - ou du moins, le moins possible. Elle s'est donnée pour pouvoir exercer le métier qu'elle voulait, et elle y est arrivée. Et elle savait, ce que ça impliquait. Chargée des relations presse, ce n'est pas de tout repos. Elle se fiche de finir parfois trop tard, d'avoir du mal à décrocher. Son boulot, c'est toute sa vie. Mais son boulot, c'est le principal obstacle à l'un de ses rêves les plus chers : avoir un enfant.3 L'amour et elle, ça fait deux. Oh, elle sait aimer, Ella. Sincèrement, passionnément, violemment. Mais elle n'est pas douée pour le montrer. Pour faire passer l'autre en priorité. Ses histoires, elles ne durent jamais très longtemps, peut-être parce qu'elle ne leur donne pas assez de chance, mais surtout, parce qu'elle ne leur consacre pas assez de temps. Pour elle, il faut toujours que tout roule, et tout de suite - parce qu'elle n'a pas le temps pour les difficultés, les obstacles, les disputes. Parce que de toute façon, entre son boulot et n'importe quel homme, son choix est vite vu. Mais le pire, c'est qu'elle ne s'en rend même pas compte, en général, Estella. Elle a cessé de compter les fois où elle annulait au dernier moment un rendez-vous, parce qu'une urgence au travail le nécessitait. Cessé de compter les ruptures qui ont suivi. Estella, c'est une catastrophe ambulante, en matière d'amour. Et malgré tout, à chaque fois que ça se finit, ça fait toujours aussi mal. 4 On lui a diagnostiqué un diabète de type 1 quand elle était plus jeune. Et finalement, c'est peut-être pour ça, que ses frères ont toujours été sur son dos - ses parents, aussi. Elle est suivie pourtant, Ella, et elle fait attention, et elle croit que maintenant, ça va. Mais elle sait qu'il suffirait d'un rien. Il n'empêche qu'à cause de son diabète, elle est devenue quelque peu control freak, bien organisée en toutes circonstances, maniaque, à regarder l'heure constamment. 5 Ce qu'on retient chez Estella, c'est sa joie de vivre, son optimisme, souvent. Jamais elle n'a voulu voir son diabète comme quelque chose de terrible, en dépit des inquiétudes de sa famille - elle, elle ne se sentait pas fragile, parce qu'à ses yeux, il suffisait de surveiller sa glycémie, d'avoir une bonne hygiène de vie, de faire attention, et c'est ce qu'elle a toujours fait, malgré quelques complications passagères par moments. Alors Estella, souvent, elle a la bonne humeur communicative. Ça ne veut pas dire pour autant, que c'est toujours facile. Elle connaît l'inquiétude, l'appréhension, elle est de nature anxieuse et elle a connu des bas importants. Elle masque simplement le tout, avec un sourire, toujours. 6 Sa vie, elle va toujours très vite. Elle a toujours quelque chose à faire, Ella. Pour le boulot, en général. Mais elle a toujours su trouver un moment dans la semaine, pour voir son groupe d'amis - ceux qui sont, comme sa deuxième famille, une autre raison d'exister. Estella, elle ne sait pas vraiment ce qu'elle ferait sans eux. Elle aime les soirées qu'ils peuvent passer ensemble, chez l'un ou l'autre, ou dans un bar. Elle, elle excelle au billard, se débrouille pas trop mal aux fléchettes et au bowling, et en prime, elle est toujours partante pour une soirée karaoké. Ses amis, ils sont sa bouffée d'air frais, dans son quotidien si rapide. Ils sont ceux, qui lui permettent, le temps d'une soirée, de ralentir. Ils se voient un peu moins qu'avant, maintenant, pourtant - parce qu'ils sont tous casés, ou presque. Il ne reste plus que Jonah et elle. 7 Elle a une vie très saine, Ella. La faute à son diabète, sans aucun doute. Elle ne mange pas gras, ses plats sont souvent bien verts - elle ne boit pas d'alcool, ou très peu. Et elle fait du sport, surtout : elle va à pied à son travail, et elle fait du tennis dans son temps libre. Ça lui permet de décompresser, aussi. Sa maladie, elle prend beaucoup de temps aussi, dans sa vie. 8 Elle se rêverait maman. Bien sûr, elle connaît les complications, mais elle s'est longuement renseignée, à ce sujet. Elle sait qu'en étant bien suivie, ça peut bien se passer. Et elle, elle veut être mère. Mais finalement, le principal obstacle, ce n'est pas sa maladie - elle se dit que c'est son âge, c'est le temps qui passe, ce sont les hommes qui ne restent pas dans sa vie. Elle a trente ans, et elle panique, Ella. Elle sait qu'avec le temps, ses chances de devenir maman diminuent - quand le risque de complications augmente. Elle s'est perdue une fois, sur internet, à lire tous les risques potentiels d'une grossesse après 35 ans, et ça l'a faite flipper. Alors c'est devenu, en quelques sortes, une obsession. Et elle s'en fiche, que son boulot ne soit probablement pas compatible, avec la vie de famille. Elle se dit que si elle veut quelque chose, Estella, elle peut l'avoir. Jamais rien ne l'a arrêtée, surtout pas sa maladie. 9 L'idée lui est venue, récemment. Après une énième rupture. Une énième défaite. Une énième peine. Ça se finit toujours de la même façon, elle ne sait pas vraiment pourquoi est-ce qu'elle s'acharne, dans le fond. Elle n'a pas le temps. Pas l'envie, peut-être aussi. Peut-être que tout ce dont elle a besoin, c'est de s'envoyer en l'air une fois de temps en temps ? Elle n'en sait rien, elle aimerait bien un peu de romance pourtant, Estella. Parce qu'elle se sent un peu seule, parfois. Elle sait qu'elle n'est pas douée, avec tout ça - qu'elle ne sait pas s'ouvrir assez, exprimer correctement ce qu'elle ressent, et qu'elle a tendance à flipper quand ça devient sérieux. Parce qu'elle tient à son indépendance, à son boulot. Parce qu'elle manque probablement de confiance. Parce qu'en début de vingtaine, elle a perdu son petit-ami d'une leucémie, et que ç'a alimenté sa peur de s'attacher. Alors peut-être qu'en fin de compte, elle tient plus au fait d'être maman, qu'au fait d'avoir quelqu'un dans sa vie - elle n'en sait trop rien. Alors voilà, Ella, elle s'est dit qu'elle aurait un bébé toute seule. Qu'elle se débrouillerait. Parce qu'elle l'a toujours fait. Le seul bémol, c'est qu'il lui faut bien un homme. Alors elle a pensé à Jonah. 10 Elle le connaît depuis des années, Jonah. Il fait partie de ce groupe de potes, auquel elle tient tant. Peut-être bien qu'il lui plaisait, à un moment - il la faisait toujours sourire, toujours rire, si aisément. Mais il s'est marié alors, ça n'a pas eu d'importance. La petite déception au fond de son cœur, non plus. Elle l'a simplement oubliée, ou enterrée. Ils étaient mieux potes, de toute façon. Alors elle s'en est contentée. Maintenant, il est à nouveau célibataire, Jonah, mais elle essaie de l'oublier. Ça n'a plus d'importance, d'intérêt. Mais puisqu'il est célibataire, elle se dit qu'elle pourrait lui demander de l'aide pour son projet. Parce que c'est son ami, parce qu'ils s'entendent bien, parce qu'elle lui fait confiance. C'est tout.

en vrac elle croit en la lithothérapie, a des cristaux dans chacun des pièces de son appartement. elle est bonne cuisinière, et prend toujours le temps de préparer (et de manger) un repas équilibré, étant donné sa maladie. elle accorde beaucoup trop d'attention à ce que sa famille va penser de ses choix. elle a un compte sur tous les réseaux sociaux, mais préfère instagram en principe. elle est tentée de débuter des cours de zumba avec une de ses copines. elle est du genre à croire aux signes astrologiques, avec une certaine réserve néanmoins, mais elle se renseigne beaucoup sur le sujet. Ella est de nature sociable, elle a le contact facile et sympathise sans difficultés. elle a adopté un chat il y a quelques années, qui lui apporte un peu de compagnie. son deuxième petit-ami était atteint de leucémie, elle l'a rencontré à l'hôpital où elle s'était retrouvée une fois, à cause de son diabète. Elle avait beau savoir qu'il ne s'en sortirait probablement pas, elle a été terriblement marquée par cette perte. elle a presque constamment du vernis sur les ongles, un miracle qu'elle en trouve le temps. elle passe rarement des soirées posées chez elle. elle parle couramment l'espagnol et le français. elle n'a, à ce jour, aucune allergie alimentaire. elle se doute que les affaires de son père ne sont pas très nettes, mais elle reste dans le déni, préfère ne pas s'en mêler. elle essaie de venir manger chez ses parents au moins une fois par semaine. à l'avenir, elle se voit bien évoluer plutôt vers un job d'experte en relations publiques, notamment dans le cadre d'une campagne politique - si elle pouvait même diriger ladite campagne, ce serait génial, mais pour l'instant, c'est surtout un grand rêve.